À propos et autour
du séminaire
«Communication Processes
and Social Transformation »
Bulletin de l'Ecole Française
d'Extrême Orient, tome 83, 1996, p. 336-346.
Le
Centre for Cooperative Research in Social Sciences
(Centre de Recherche Coopérative en Sciences Sociales, ci-après
C.C.R.S.S.) de Poona, dirigé par Guy Poitevin, a organisé du 8 au
13 janvier 1996 à Poona, centre culturel de l'État du Maharashtra
(Inde), un séminaire international intitulé « Communication
Processes and Social Transformation », avec le concours de la Fondation
pour le Progrès de l'Homme (ci-après F.P.H.) de Paris, représentée
par Catherine Guernier.
Répondant à l'invitation
de la F.P.H., plusieurs participants sont venus de plusieurs pays du monde.
[2]Les invités
du C.C.R.S.S. comprenaient une trentaine de responsables d'associations
indiennes et de travailleurs sociaux issus de différentes régions
de l'Inde,
[3]une équipe
d'animatrices et d'animateurs appartenant au C.C.R.S.S. ou à la
Village Community Development Association
(ci-après V.C.D.A.),
[4]association liée
au C.C.R.S.S., des chercheurs européens travaillant en Inde
[5]et quelques
personnalités connues pour l'intérêt qu'elles portent aux
travaux du C.C.R.S S.
[6]
Bien que cette manifestation eût
un caractère non universitaire, il a paru important d'y consacrer une
chronique, compte tenu du caractère peu banal de cette rencontre: une
soixantaine de personnes; une dizaine de langues, sans que l'anglais n'en écrase
aucune, avec des traducteurs qui ont fait de leur mieux; des personnalités
de tous les bords, de toutes les formations et de tous les niveaux scolaires ou
universitaires, sans que personne ne se sente mal à l'aise à aucun
moment; une organisation rigoureuse et minutieuse, soucieuse de tous les détails
matériels, mais veillant en même temps à désacraliser
la solennité des interventions, en n'établissant pas au préalable
une liste et un ordre de passage des intervenants.
Guy Poitevin et la fondation de la Village Community
Development Association et du Centre for Cooperative Research in Social Sciences
Il faut noter d'entrée de jeu que
Guy Poitevin a toujours voulu que les deux organisations qu'il a fondées,
la V.C.D.A. et le C.C.R.S.S., ne soient pas l'émanation d'une seule
personne irremplaçable et omniprésente, qu'il s'agisse de lui ou
de quelqu'un d'autre, et qu'il a de ce fait constamment oeuvré, et oeuvre
encore, pour leur conférer des statuts garantissant un fonctionnement démocratique.
Pour autant, la fondation de la V.C.D.A. et celle du C.C.R.S.S. doivent tout de
même être considérées dans un premier temps comme des étapes
dans le parcours intellectuel de Guy Poitevin, que nous allons brièvement
évoquer.
Né en 1934 en France, Guy
Poitevin fait des études de philosophie à l'université
Gregoriana de Rome -- où il reste cinq ans --, puis en Sorbonne à
Paris. Enseignant plus tard cette discipline, il fait partie des premiers qui
initient leurs élèves aux courants philosophiques indiens. En
1967, Guy Poitevin fait partie d'un groupe de visiteurs français à
Poona désireux de découvrir en profondeur l'Inde au quotidien. Il
y vient à nouveau en 1969 avec ses élèves. À
l'origine de ces voyages -- qui prenaient la forme d'échanges entre la
France et l'Inde dans le cadre d'une association appelée « Friends
of France » -- était Achyut Apte, un ingénieur formé à
Grenoble, qui travaillait alors au barrage de Khadakwasla, en amont de Poona:
l'aide de ce dernier, dont il faut noter qu'il avait lancé des foyers et
des programmes d'éducation pour les jeunes issus des campagnes, fut décisive
pour Guy Poitevin, qui revint en Inde en 1972, pour un séjour de longue
durée cette fois.
[7]
Pendant ces premières années
à Poona, Guy Poitevin découvre qu'il y a un énorme hiatus
entre ce que les clichés occidentaux d'une part, mais aussi les élites
de Poona d'autre part, lui présentent de la société
indienne et ce qu'il observe par lui-même. Ces représentations sont
des constructions indexées sur les valeurs des classes
socio-culturellement dominantes, qui les mettent en circulation en contrôlant
et en imposant les modes de communication par lesquels elles s'imposent à
ceux-là mêmes qui en pâtissent -- et qui finissent par les
intégrer dans leur comportement social. Ne faut-il pas d'abord aller à
la rencontre de ces humbles, sans idée préconçue, sans mépris
ni complaisance, et en jouant franc jeu ?
À partir de 1972, Guy Poitevin a
des contacts « libres et personnels » -- selon sa propre expression --
avec des étudiants d'origine rurale avec lesquels il conduit une première
recherche psycho-sociologique.
[8] Plutôt que
de développer une conscience sociale critique correspondant à leur
niveau d'études, ces groupes de jeunes lui en sont apparus d'autant plus
dépourvus qu'ils étaient avancés dans leurs études.
Le système d'éducation contribue le plus souvent à aliéner
les « éduqués » des milieux dont ils sont issus -- et
avec lesquels ils deviennent incapables de se mettre en rapport.
Dans ces mêmes années, il
rencontre son épouse Héma Rairkar (née en 1939), originaire
de Poona: celle-ci, après une formation en sciences économiques,
menait depuis 1963 des activités de recherche et de documentation au
Gokhale Institute de Poona, où elle contribua notamment à une
bibliographie de l'histoire économique de l'Inde. Héma Rairkar a
travaillé dans cette institution jusqu'en août 1991, date à
laquelle elle a pris une retraite anticipée pour consacrer tout son temps
aux programmes du C.C.R.S.S. En marge de son travail au Gokhale Institute, elle
a étudié les formes de fiscalité et les systèmes économiques.
[9]D'autre part,
sensibilisée très tôt aux problèmes de la législation
relative à l'intouchabilité, c'est à ce sujet qu'elle a
consacré une autre étude.
[10]
Guy Poitevin décide alors de
rester en Inde, et prend la nationalité indienne qu'appelle son
engagement au service des groupes sociaux marginalisés de l'Inde. Il a
alors déjà acquis une maîtrise du marathi écrit et
parlé, qui lui permet de mener cette tâche dans les meilleures
conditions de communication et de compréhension.
En 1978, Guy publie en collaboration
avec Denis Von der Weid un ouvrage
[11]sur une expérience
de « conscientisation », dont il s'était inspiré pour
lancer un premier programme d'animation socio-culturelle avec des étudiants
des groupes d'Achyut Apte sous l'égide du docteur Modak
[12]à
Khanapur.
La V.C.D.A., mouvement d'action sociale
et politique, est créée en 1978 pour encourager et faciliter les
essais de conscientisation socio-culturelle et d'auto organisation, chez les
laissés-pour-compte du développement afin d'explorer des voies
possibles d'intervention 5 sociale dans la perspective de Paolo Freire.
[13]
En 1982, c'est la fondation du
C.C.R.S.S. avec le concours de spécialistes en sciences sociales de
diverses institutions universitaires françaises
[14]et indiennes,
parmi lesquels on mentionnera P.H. Chombart de Lauwe, V.M. Dandekar
[15]et Y.B. Damle
[16]. Sa vocation
est de mettre en oeuvre des recherches en sciences sociales visant à éclairer
les processus de changement et de développement sociaux, en coopération
avec des chercheurs travaillant dans les mêmes perspectives.
Comme on le voit, le passage de la
France à l'Inde a été progressif, fait de ténacité
et de patience, et c'est peu à peu, par expérimentations et mises
au point successives, que se sont concrétisés les savoir-faire et
les actions d'intervention sociale.
La Village Community Development Association et le Centre for
Cooperative Research in Social Sciences
Bien qu'étant des institutions
distinctes et ayant chacune des pratiques différentes, ces deux
organisations n'en partagent pas moins les mêmes références,
qu'il importe d'expliciter, avant de les décrire l'une et l'autre. Leurs
pratiques et leurs méthodes de travail respectives, s'inspirent
principalement d'une part de la notion de « conscientisation », développée
par Paolo Freire, à laquelle Guy Poitevin préfère ce qu'il
appelle l'« action socio-culturelle », et d'autre part de celle de «
culture-action », telle que l'a définie P.H. Chombart de Lauwe.
[17] Pratiquement,
l'« action socio-culturelle » conduit à la «
culture-action », en prenant la forme d'une « recherche-action ».
Un mot-clé permet de comprendre le passage de l'une à l'autre dans
la pratique de ces deux organisations: il s'agit du terme « coopératif
»
[18], présent
d'ailleurs dans le nom du C.C.R.S.S. Chez Guy Poitevin, la notion de « coopératif
» est à comprendre à partir de celle de « participatory »
[19](que nous
rendons en français par le néologisme « participatoire »
[20]) , dont elle
se veut une version améliorée propre au contexte particulier et à
la situation présente de l'Inde contemporaine.
La « recherche-action »,
participatoire ou coopérative, reconnaît comme légitime la
contribution de l'informateur à la production du nouveau savoir qui résulte
de sa mise en oeuvre. Autrement dit, contrairement à ce qui se passe dans
la recherche sociologique ou anthropologique académique, au terme de
laquelle l'informateur ne quitte pas son statut d'informateur, en «recherche-action»
ce dernier est partie prenante au résultat obtenu « coopérativement
». L'espace de communication inauguré en reconnaissant aux «
silencieux » la pertinence de leur discours
[21]devient le
milieu de production d'un savoir social: la recherche théorique ne se
dissocie pas ici d'un but pratique, l'intervention sociale efficace. Dans le
contexte indien, toutefois, la pratique de la recherche participatoire, où
l'informateur devient partenaire et co-producteur du savoir, tend à se réduire
à l'utilisation des ressources de la dynamique de groupes et des
techniques de communication, s'estimant satisfaite quand elle a fait parler et
participer, mais ayant omis de se demander qui fait parler et de quoi on fait
parler .
[22]
Dans quelles conditions le savoir social
ainsi produit est-il authentique et quels buts peuvent légitimer une
telle production ? Qui peut prétendre légitimement produire du
savoir social adéquat ? La recherche coopérative, en tant qu'amélioration
de la recherche participatoire, vise à une prise de parole spontanée
par une communauté, par la voix d'interlocuteurs agréés par
celle-ci et avec ses propres
media, le tout en vue d'une expression politique contestataire.
[23] Cela exige en
particulier une formation spécifique des animateurs, qui sont
habituellement issus de milieux très faiblement scolarisés.
La Village Community Development Association
La V.C.D.A. est une association
enregistrée auprès du Charity Commissionner
[24], dotée
de ce fait d'un statut légal d'institution (en marathi
samsthâ). Le corps des animateurs engagés dans l'action
effective au niveau des villages
[25]comprend une
centaine de volontaires ayant une activité par ailleurs (agricole dans la
plupart des cas): la V.C.D.A. a en effet pour principe de ne pas fournir
d'emplois à temps plein, à l'heure précisément où
les organisations sociales non gouvernementales de l'Inde auraient tendance à
se fonctionnariser et où, dans la profession, certains aimeraient établir
une échelle des salaires, de la fonction de travailleur social (social
worker) à celle de directeur de projet (project holder).
Avec des financements d'origines
diverses (pour l'essentiel maintenant de l'organisation
Bread for the World
de Stuttgart, de Terre des Hommes-Allemagne et du Comité Catholique
contre la Faim et pour le Développement de Paris), la V.C.D.A. couvre le
vaste et contrasté district de Poona.
Guy Poitevin, depuis maintenant
plusieurs années, s'est mis à l'écart de la V.C.D.A., et a
cédé ses « prérogatives » à Sitaram
Bajare, un animateur de 46 ans, originaire de Burkegao, au nord-est de Poona, où
il est exploitant agricole. Ayant commencé des études d'ingénieur,
il dut les interrompre lors de la grande sécheresse de 1972. Autodidacte,
il a été
sarpânch[26]-- socialiste -- de son village, et s'est rendu en France en
1989, où il a pu se familiariser avec un autre contexte socio-culturel.
Tous ces éléments, ainsi que son intégrité et sa maîtrise
de l'anglais (acquise récemment, à force de travail), l'ont désigné
pour être le présent chef du mouvement.
Compte tenu de la variété
des programmes et de l'étendue de la sphère d'influence de la
V.C.D.A., et pour éviter d'éventuelles dérives, un comité
regroupant les huit principaux animateurs a été mis sur pied.
Celui-ci comprend trois femmes, parmi lesquelles on notera Tarabai Ubhe (35 ans)
et Kusum Sonawane (38 ans)
[27], deux figures
importantes de l'organisation dans la région du Mawal, à l'ouest
de Poona, qui participent également activement aux activités de
recherche du C.C.R.S.S. Parmi les autres personnalités du mouvement, on
notera Kachru Salve de Shirur, au nord-est de Poona, Prabhakar Gare du Mawal et
surtout Pandit Padalghare, du Mawal également, qui est sans doute celui
qui a le mieux intégré dans sa réflexion et sa pratique les
notions de démocratie et d'égalité -- en particulier d'égalité
des sexes.
Les préoccupations de la V.C.D.A.
se reflètent dans ses programmes: emploi, travail des enfants, santé,
auto-formation, etc. Nous n'entrerons pas dans le détail et soulignerons
plutôt deux grandes étapes de l'organisation dans le passé récent.
- Le début des années 1990 a vu la
construction d'un centre rural à Pabal, à 50 km au nord-est de
Poona, avec principalement le financement du Secours Populaire. Ce centre est
l'ouvrage (dans tous les sens du terme, y compris en ce qui concerne la maçonnerie)
de Sitaram Bajare. La vocation des installations de Pabal est certes de régler
les problèmes de locaux d'une organisation qui s'est développée,
mais aussi un peu de « dépoonaïser » la V.C.D.A., en lui
donnant un siège rural.
- Depuis 1990, des ateliers d'auto-formation (en marathi
svayam-shikshan kâryâlay
), financés par
Bread for the World,
se réunissent, prenant la forme de neuf stages de six journées
à raison d'un tous les deux mois. À Vitthalwadi, dans la banlieue
de Poona, des équipes de la V.C.D.A. accueillent les participants (entre
20 et 30), animateurs et activistes en provenance de l'ensemble du Maharashtra,
appartenant le plus souvent à d'autres organisations sociales. Ces
rencontres ont pour but premier la prise de parole et la communication, puis, au
delà des techniques d'expression, l'apprentissage de la réflexion
et de l'action en groupe: l'accent est donc mis sur l'aptitude personnelle du
participant, ainsi que sur sa maîtrise de la langue et du vocabulaire.
[28] Une formule
peut résumer le principe de ces ateliers: action sociale et non pas
travail social. Les animateurs doivent en effet devenir des acteurs sociaux
engagés, avec une formation socio-politique, aptes à éveiller
parmi les membres des communautés dont ils sont issus une conscience
sociale élargie. L'animateur est dans son groupe un pôle
catalytique, un germe de cristallisation, et non l'instructeur de ce groupe, ni
son pourvoyeur de subsides. Le processus de maturation par lequel l'animateur
potentiel se réalise au sein de sa communauté implique une
reconstruction progressive et lente de sa personnalité individuelle et
sociale. Il doit se libérer des contraintes et pressions sociales qui pèsent
sur lui, contourner, défier, voire subvertir les systèmes
d'autorité et de communications asymétriques prévalents,
afin d'être à même de susciter à son tour parmi les
sans-autorité, les sans-voix, d'autres animateurs capables de dire leur
mot, de prendre voix et de s'engager personnellement à agir pour leur
communauté.
À l'issue des dix-huit mois du stage, le
participant fait encore l'objet d'un suivi, et est notamment invité à
participer à des sessions pour anciens,
[29]où l'on
insiste alors plus sur le traitement de sujets précis que sur la
personnalité de l'intervenant.
Le Centre for Cooperative Research in Social Sciences
Centre de recherche à part entière,
le C.C.R.S.S. a par définition un mode de fonctionnement différent
de celui du V.C.D.A. Tout d'abord, son comité, dirigé par le
sociologue Y.B. Damle, est constitué de personnalités
scientifiques,
[30]à même
de suivre les orientations du C.C.R.S.S.
D'autre part, les chercheurs qui
travaillent dans le cadre du C.C.R.S.S., bien que peu diplômés et
de ce fait académiquement non habilités, doivent être à
même de conduire une recherche, et partant de regarder de manière
critique et distanciée leur sujet, ce qui requiert un certain niveau
d'instruction -- il arrive au contraire que certains animateurs de la V.C.D.A.
soient complètement illettrés -- et ce qui n'exclut pas, bien au
contraire, les personnes issues de milieux urbains ou semi-urbains, qui se sont
déjà éloignés des activités traditionnelles
de leur famille.
[31]
Le C.C.R.S.S., qui est principalement
financé par l'Unesco (sur un fonds octroyé par les Pays-Bas) et
par la Fondation du Progrès de l'Homme,
[32]a des
programmes de recherche, dont le plus en vue -- depuis maintenant plusieurs années
-- est celui qui concerne les chants de femmes à la meule (en marathi
ovî). Héma Rairkar, qui peut être considérée
comme l'une des chevilles ouvrières du C.C.R.S.S., participe à
tous les programmes, mais son nom est plus particulièrement lié à
deux d'entre eux:
- L'étude des femmes porte-faix (coolies) du
Market Yard de Poona, aujourd'hui terminée, a fait l'objet d'une
publication, qui fait état d'une grande collection de témoignages
et pose le problème des processus migratoires à la périphérie
d'un grand centre urbain comme Poona.
[33]
- La collecte et l'étude des chants de la meule,
distiques chantés pendant la mouture avant le lever du soleil, dans
lesquels les femmes évoquent l'ensemble de leur vécu, joies comme
frustrations. Le corpus collecté -- à l'instigation de Héma
Rairkar et avec les collaborations de Jitendra Maid et de Datta Shinde depuis
1992 -- dans la région de Mawal, à l'ouest de Poona, comprend à
présent 30000
ovï. La recherche en cours se fait, sous l'impulsion de Guy
Poitevin, dans plusieurs directions (anthropologie, littérature orale,
musicologie et acoustique, communication), avec plusieurs thèmes (le
travail, les dieux de village, les fêtes agricoles, le destinataire des
chants de la meule, etc.) et avec la collaboration de chercheurs étrangers
(entre autres, Karim Amari musicologue, Bernard Bel du C.S.H. et Jean Pacquement
de l'EFEO). Héma Rairkar a formé personnellement en compagnie de
Guy Poitevin les personnes qui collectent les
ovî et a animé des séminaires en marathi sur le
sujet.
[34]
Mais ces deux programmes ne doivent pas
dissimuler les autres, qui n'ont pas encore pris cette ampleur.
- Héma Rairkar anime un groupe de réflexion
sur les femmes abandonnées (en marathi
parityaktâ), qui se réunit depuis trois ans chaque huit du
mois, et qui a rassemblé de nombreuses études de cas. En rapport
avec ce thème, Héma Rairkar a lancé des programmes de théâtre
de rue dans des marchés de villages de la région de Poona.
- Guy Poitevin, dont on sait qu'il a, depuis son arrivée
en Inde, fait lui-même ou suscité de nombreuses traductions de
textes littéraires, documentaires ou autobiographiques,
[35]a commencé
à réunir de nombreux témoignages autobiographiques et des
monographies de castes ou de communautés marginalisées, dont l'une
a déjà pu être publiée
[36]-- en
attendant la publication de sa traduction en français. Ce programme se
situe dans le prolongement des ateliers d'auto-formation, et les principaux
chercheurs liés à ces recherches en cours sont d'ailleurs d'abord
passés par les exercices de communication de Vitthalwadi: Sanjay Jogdanda
sur les
matang ou
mang, Suresh Kokate sur les
parit -- caste des buandiers
[37]--, Kushal
Kachre sur les
kolhati -- caste dont les femmes sont prostituées et danseuses de
cabaret -- et Datta Shinde sur les
vadar-- caste liée au métier de la pierre.
Le séminaire « Communication Processes and Social
Transformation »
Comme on l'a esquissé ci-dessus,
le but de la « recherche-action », tout en visant à produire
d'une manière « coopérative » un savoir social, est de
se donner les moyens de susciter une prise de parole spontanée et une
expression politique autonome parmi les groupes sociaux cibles de l'action.
L'accès à la communication et les enjeux politiques de celle-ci
constituant donc l'objet principal de ce type de recherche, il n'y a rien d'étonnant
à ce que ces sujets aient été les thèmes retenus par
le C.C.R.S.S. pour le séminaire qu'il a organisé.
L'intention n'était certes pas de
faire un séminaire de type académique, où chaque
participant aurait présenté des résultats de ses recherches
à des confrères. Il ne s'agissait pas non plus d'examiner, en s'y
limitant, les nombreux tenants et aboutissants des théories de la
communication. La rencontre visait à favoriser une auto-investigation
collective des expériences de communication dans l'intervention sociale
des participants afin de rendre celle-ci plus efficace et plus adéquate à
son objet, c'est-à-dire capable de générer des
transformations sociales. Bref, il était question de réfléchir
sur les processus de communication sociale pour mieux agir sur eux en vue d'une
restructuration sociale.
Une originalité de ce séminaire
était l'attention particulière qu'il accordait aux formes de
communication traditionnelles, auxquelles il consacra une journée de
travail intitulée « Between Tradition and Modernity ». Le séminaire
ambitionnait par ailleurs de mettre l'Inde en perspective avec d'autres pays que
ceux de l'Asie sanscritisée et de l'Europe occidentale, mais, de ce point
de vue, il a probablement été une occasion manquée, de manière
particulièrement frappante dans la journée « Between
Tradition and Modernity », où la participation de la plupart des étrangers
invités a été plutôt décevante, et ce alors
que les participants de l'Inde se sont tous sentis concernés au premier
chef dans les discussions très animées qui caractérisèrent
cette session.
La logistique du séminaire était
à la hauteur de la participation. Se relayant, plusieurs interprètes
professionnels ont facilité les communications et les échanges,
qui se sont le plus souvent déroulés en anglais et en marathi. Des
spécialistes de la communication parmi les participants en faisaient un
compte-rendu quasi simultané sur ordinateur, cependant que l'intégralité
des débats était enregistrée. L'accueil, les transports et
l'hébergement n'ont pas laissé transparaître les nombreuses
et fastidieuses démarches et les arrangements préalables que leur
organisation a nécessités.
L'abondante littérature produite
par les différents participants à l'occasion du séminaire
avait été préalablement envoyée à chacun
d'eux, et tous étaient censés en avoir pris connaissance à
l'arrivée à Poona. S'étalant sur six jours, l'agenda était
dense, trop chargé sans doute compte tenu du nombre de participants et
des inévitables délais de traduction.
Conformément à la formule
pratiquée dans les journées d'auto-formation de Vitthalwadi, le
premier jour et la matinée du lendemain, les participants étaient
invités à se présenter. L'aspect subjectif et informel de
ces auto-introductions a été l'une des réussites de ce séminaire,
selon l'avis même de Guy Poitevin. Au-delà de l'aspect très
ritualisé en Inde -- et de fait parfois stéréotypé
-- des présentations et de leurs lieux communs dans le milieu des
activistes sociaux (insistance, d'une part, chez certains sur la pauvreté
du milieu d'où ils étaient issus, insistance parfois suspecte,
laissant planer des doutes sur la véracité psychosociale des
autobiographies; pétitions de principes anti-brahmanes, d'autre part, au
caractère presque obligé), au-delà également du
liant créé par cette première étape, qui a permis au
séminaire de « prendre » sur le plan des contacts humains, la séance
des auto-introductions, même si elle a pu laisser plus ou moins sceptiques
des participants au profil plus universitaire, a été l'occasion
d'une expérience de communication entre acteurs sociaux engagés,
un début de « recherche-action » menée en commun,
illustrant le fait qu'il ne saurait y avoir de conceptualisation sans l'épreuve
de la pratique, ni de pratique sans une prise de conscience collective de ses
implications, ni enfin d'échange de savoir sans un esprit d'engagement
partagé. Il s'est passé quelque chose à ce moment-là,
car il est de fait que certains participants, qui étaient venus pour voir
et ne comptaient pas rester pour l'ensemble du séminaire,
[38]ont alors
changé d'avis, s'avérant en fin de compte les plus assidus et ceux
qui se sentaient le plus concernés.
[39]
La suite du séminaire était
divisée en trois unités thématiques, « Social Actors
as Communicators », « Between Tradition and Modernity » et «
Media, Ways and Means vs. Social Relations of Communication », dans
lesquelles chacun faisait part, à sa façon -- et dans sa langue,
une personne ne parlait que télougou -- du contenu et de l'orientation de
ses expériences. Chacune de ces interventions donnait naissance à
un dialogue aux facettes multiples, qui n'a pas toujours été
exempt de quelques tensions ou de confusions.
Instaurant des pauses bienvenues dans le
déroulement du séminaire, un après-midi a été
réservé à la rencontre en sous-groupes d'équipes
d'action sociale ou culturelle de Poona, et une journée a été
consacrée à des visites de villages, notamment de Pabal, à
l'occasion desquelles ont pu avoir lieu des discussions avec des animateurs et
animatrices ruraux sur leur terrain, le tout se trouvant agrémenté
de séances de théâtre de rue et de repas campagnards.
Plusieurs enregistrements vidéographiques ont été présentés,
commentés par leurs auteurs et discutés. Des chansons paysannes et
des chants de la meule, des mimes, des danses remplissaient de courtes récréations.
Tous se retrouvaient le soir autour d'une même table où s'échangeaient
des conversations variées.
On ne s'est jamais fourvoyé en généralités
sur le développement, risque dont semblaient conscients les participants
dans leur ensemble ou en considérations purement techniques sur les
usages de la vidéo chez les marginaux, dont il a été
beaucoup question. Si le ton a parfois monté, les échanges sont
restés respectueux. Des questions plus intéressantes se sont
souvent trouvées diluées dans l'échange non-critique de
concepts très généraux où chacun pouvait facilement
trouver son compte sans pour autant faire avancer les discussions: la qualité
de celles-ci s'en est ressentie, et elles n'ont que rarement rejoint en
profondeur le niveau d'élaboration théorique, parfois
philosophique, dont font preuve les textes de travail fournis par Guy Poitevin
pour la rencontre.
On formulera peut-être un regret
concernant le contenu-même du séminaire, à savoir que les
participants activistes sociaux, étrangers comme indiens -- du moins ceux
extérieurs à la V.C.D.A. et au C.C.R.S.S. -- aient en général
parlé de la communication sans dépasser vraiment le stade de
l'expression ou de la gestion technique de la communication, restriction de fait
de la matière à sa partie apparente, pour ne pas dire à sa
partie banale, malgré certaines interventions et l'attente de Guy
Poitevin lui-même. Un des résultats prévisibles de l'absence
de distinction entre expression et communication a été l'absence
de réflexion sur le destinataire des
media: on a ainsi longuement évoqué la vidéo et le
cinéma sans poser vraiment le problème du public.
Faudrait-il s'en étonner ?
Comment faire dialoguer tant de points de vue, tant de sensibilités
culturelles et tant de spécialistes différents sur un thème
aussi complexe, et aussi large: d'une part la littérature fournie représentait
plusieurs centaines de pages, et d'autre part, l'éventail des sujets qui
pouvaient légitimement se rattacher au thème du séminaire a
tendu à recouvrir une grande partie de la sociologie et de
l'anthropologie réunies.
Mais ne devrait-on pas plutôt s'étonner
qu'une telle rencontre ait été possible, qu'une telle mise en
commun de bonnes volontés puisse se concrétiser, qu'un désir
de rencontre constructive puisse rassembler avec autant d'attention et de
bienveillance réciproque, sans mépris ni fausse commisération,
du professeur universitaire à la villageoise proche de l'illettrisme ? Là
est l'événement principal, là est sa portée, là
est son avenir, déjà assuré par les engagements de
rencontre qu'on s'est donnés, dans l'élan d'une dynamique d'action
et de réflexion.
« Au-delà des sept mers
[40], les hommes
sont comme nous » ont conclu Tarabai Ubhe et Kusum Sonawane, animatrices de
la V.C.D.A. et interprètes aussi talentueuses qu'inlassables de chants de
la meule !
Pierre LACHAIER et Jean PACQUEMENT
Bibliographie
HALLB A. G.et TANDON,R. (éd),
1982.
Creating Knowledge: A Monopoly -- Participatory Research in Development,
Delhi, Society for Participatory Research in Asia, (Participatory Research
Network Series No. 1).
CHOMBART DE LAUWE, P.H., 1975.
La culture et le pouvoir,
Paris, Stock.
FREIRE, P., 1974.
Pédagogie des opprimés,
Paris, Maspero.
Ouvrages et articles de Guy Poitevin et de Héma Rairkar
POITEVIN, G., 1983. Compte rendu de
Creating Knowledge: A Monopoly -- Participatory Research in Development,
édité par A. G. Hallb et R. Tandon, Delhi, Society for
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1), in Sociological Bulletin, 32, 2, septembre, p. 220-224.
POITEVIN, G., 1984. « Towards a
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Paddyâ âd
[Derrière le rideau], introduction de Guy Poitevin, Poona,
Continental Prakashan, (Traduction française
Ma caste criminelle,
L'Harmattan).
[1]C'est
ici l'occasion de rappeler les liens anciens, scientifiques aussi bien que
personnels, des deux auteurs de ce texte -- et d'autres membres de l'EFEO --
avec le C.C.R.S.S. et les personnalités qui l'animent, au premier rang
desquels Guy Poitevin et Héma Rairkar, sans parler de l'accueil toujours
chaleureux et serein de l'ensemble de l'organisation. Celle-ci met à la
disposition de tous son expérience, les informations qu'elle a collectées
et sa documentation, tout en facilitant l'accès à ses réseaux
en zone rurale et dans les bidonvilles.
Nous voulons d'autre part remercier Guy
Poitevin, qui nous a permis d'écrire ce texte et qui a pris le temps de répondre
à nos questions sur le
Centre for Cooperative Research in Social Sciences
et la
Village Community Development Association.
+ de Colombie, M. Ricardo Gomez,
doctorant en techniques de communication au Canada;
+ du Brésil, Mlle Eliana
Costa-Guerra, présentement étudiante à l'Institut français
d'Urbanisme à Paris, et M. Marcio da Souza, journaliste;
+ de Tanzanie, M. Amon Mattee,
professeur à l'université d'Agriculture de Sokoine;
+ de France, M. Thierry Paquot, qui
enseigne la philosophie à l'université de Nanterre et à l'École
d'Architecture de La Défense, éditeur de la revue
Urbanisme, fondateur de la maison d'édition Descartes & Cie.
[3]Parmi
lesquels nous citerons Mmes Gargi Sen de Magic Lantern Foundation (Delhi) et
Munira Sen de Madhyam (Bangalore); MM. Suresh Awasthi d'Amati Mandali (Vyara),
Ajit Hari de Campus Film Society (Madras), Edwin Jayadas de B.C.O. (Bangalore),
Meghnath (Ranchi), Philip Padachira de Camera (Bombay), Nitin Paranjpe
d'Abhivyakti (Nasik), Sandeep Pendse de Vak (Bombay), Ratnam (Hyderabad).
[4]Mmes
Tarabai Ubhe et Kusum Sonawane; MM. Sitaram Bajare, Suresh Kokate, Prabhakar
Gare, Sanjay Jogdanda, Kushal Kachre, Jitendra Maid, Bhimsen Nanekar, Pandit
Padalghare, Kachru Salve, Datta Shinde.
[5]Mme
Hanne de Bruin, I.F.P., Pondichéry; MM. Bernard Bel, CNRS, détaché
au C.S.H., Delhi, Pierre Lachaier, EFEO, Pondichéry et Jean Pacquement,
EFEO, Poona.
[6]Mmes
Andréine Bel, chorégraphe, Delhi et Riet Turksma, Premier
Conseiller de l'Ambassade des Pays-Bas, Delhi; M. Andreas Derda, acteur,
Hambourg.
[7]L'organisation
mise sur pied par Achyut Apte est le
Student Welfare Association
(en marathi
vidyârthî sâhâyyak samitî
). L'intention d'Achyut Apte était que Guy Poitevin fût un pédagogue
ou un éducateur au service de ces étudiants.
[9]Héma
Rairkar est l'auteur d'un ouvrage en marathi sur cette question (1969).
[11]Denis
von der Weid et Guy Poitevin (1978).
[12]Le
docteur Modak est un médecin d'idéologie gandhienne, qui, après
l'Indépendance, a choisi de s'installer dans un village (Khanapur), où
il a fondé une organisation, l'Association pour le Développement
des Sahyadri (
sahyâdrî vikâs mandal
) destinée à lutter contre l'intouchabilité.
[14]Parmi
lesquelles, l'EHESS et le CNRS.
[15]Le
statisticien V.M. Dandekar (décédé en août 1995)
travailla au Gokhale Institute, dont il fut le directeur pendant de nombreuses
années, puis, par la suite, à
Arthabodh, une École de Poona spécialisée en économie
politique, dont il est le fondateur. Son nom est associé à un «
classique » sur la pauvreté en Inde (V.M. Dandekar et N. Rath,
Poverty in India,
1971) et à de nombreuses enquêtes, qu'il conduisait avec M.B.
Jagtap. Avec ce dernier, il a écrit un livre consacré à la
vie d'un village pendant toute une année, où il décrit
minutieusement les travaux agricoles et passe en revue la chronique politique, économique
et judiciaire de la localité (V.M. Dandekar et M. B. Jagtap,
Gâv Rahâtî
« Le cycle du village », Bombay, H.V. Mote Prakashan, 1963).
[16]Y.
B. Damle, sociologue, fut étudiant puis professeur au Deccan College, et
ensuite à l'université de Poona, après le transfert des départements
de sociologie et d'anthropologie vers ce campus. En sa qualité de président
du C.C.R.S.S., c'est à lui qu'est revenu le soin d'ouvrir le séminaire
« Communication Processes and Social Transformation ».
[17]P.
H. Chombart de Lauwe (1975).
[18]Malgré
les liens de G. Poitevin avec H. Desroches -- qui fut son directeur de recherche
-l'acception du terme « coopératif » n'est pas la même
que dans le « Collège Coopératif » de ce dernier, où
il renvoie aux méthodes de l'économie sociale.
[19]Introduite
en Inde par l'ouvrage de A.G. Hallb et R. Tandon (1982), dont Guy Poitevin a
fait un compte rendu (1983).
[20]Le
terme « participatory » -- que nous rendons par « participatoire »
-- est à distinguer de « participant », dans le sens où
l'anthropologue entend ce mot lorsqu'il fait une observation « participante
».
[21]La
distance entre sujet et objet vise ici à être dépassée:
l'objet devient en même temps un sujet potentiel qui produira
collectivement du savoir sur lui-même, et tout d'abord pour son propre
usage socio-politique.
[22]Cette
dernière question, cruciale dans le contexte indien, pose le problème
de la formation des animateurs sociaux: dans un pays où «
surabondent » les organisations non gouvernementales, on a créé
un cursus (avec des départements, et même des Écoles, comme
le Karve Institute of Social Work à Poona, tout comme il y a des
Instituts de « management » ou d'administration). Or ce cursus a un véritable
problème de vivier: on n'y entre pas par vocation, mais par manque de
place ailleurs (c'est à-dire les études d'ingénieur ou de médecine).
Les titulaires d'un « Master of Social Work » se recrutent dans
l'ensemble parmi les classes sociales avantagées, et leur standard de vie
occasionne un dénivellement à l'égard des bénéficiaires
du travail social, qui sera dans le meilleur des cas du « Welfare ».
Le contexte de libéralisation économique rend la situation encore
plus délicate: le discours traditionnel des organisations non
gouvernementales sur la corruption du politique a été pris au pied
de la lettre par le Gouvernement, qui trouve commode de se décharger sur
celles-ci d'un certain nombre de tâches, de sorte que, pour ne prendre en
compte que le domaine de la santé, ceux qui se retrouvent en charge de
programmes ne sont plus des professionnels de la santé, mais les diplômés
du « Master of Social Work ».
[23]Contestataire,
et non revendicative, comme dans le cas des organisations syndicales, dont la
V.C.D.A. se distingue.
[24]Il
faut noter que l'enregistrement reste optionnel pour une organisation sociale ou
politique en Inde, qui peut très bien exister -- y compris avec un grand
nombre de membres ou d'adhérents -- sans être légalisée.
[25]Au
niveau local, les groupes des volontaires de la V.C.D.A. peuvent prendre
d'autres noms: on a ainsi le Mouvement des Pauvres de la Montagne (
garîb dongrî sanghanâ
) et l'Association de la Force des Femmes (
strî shaktî mandal
).
[26]Le
sarpanch du village est à la tête du
grâm panchâyat
(mot à mot les « cinq du village », mais le nombre est
variable), conseil municipal dont la compétence principale est de gérer
les fonds de l'État pour l'économie locale, et donc en particulier
les projets de développement agricole. On compte théoriquement un
grâm panchâyat
pour 2000 habitants.
[27]Ces
deux femmes -- la première est
maratha, la seconde est
mahar -- n'ont pu aller longtemps à l'école et ont
travaillé dans les champs dès l'enfance. Leurs enfants sont déjà
mariés, et l'une d'elles est grand-mère.
[28]C'est
le lieu de noter la constance de l'intérêt de Guy Poitevin -- qui
se réfère souvent à Émile Benveniste -- pour les phénomènes
de langue, et tout particulièrement pour les études de
vocabulaire, tant en langue (sémiologique) qu'en contexte (sémantique),
fondement principal selon lui de l'action socio-culturelle.
[29]Sessions
bi-annuelles qui réunissent en moyenne 50 à 60 personnes.
[30]Parmi
lesquelles on notera Ram Joshi, spécialiste de sciences politiques, qui a
été Vice- Chancellor de l'Université de Bombay, et qui est
l'ancien président du comité du C.C.R.S.S., et Nilkantha Rath, spécialiste
d'économie agricole, qui a dirigé le Gokhale Institute à la
suite de V.M. Dandekar.
[31]Ainsi,
Jitendra Maid (25 ans) est de la caste des
sonar (les orfèvres), mais son père est cultivateur, son
frère vient d'obtenir un poste d'instituteur. Lui-même a un M.A. de
journalisme et souhaiterait faire à présent un autre M.A., de
sociologie cette fois-ci, quand il aura le temps, mais aussi quand son anglais
se sera amélioré. Datta Shinde, d'origine
chambhar
(caste des métiers du cuir), est titulaire d'un diplôme d'éducation,
et a un poste d'instituteur dans la région d'Indapur, à l'est de
Poona. On notera qu'il a reçu des décorations de l'Etat du
Maharashtra en cette qualité.
[32]On
notera que le C.C.R.S.S. reçut au tout début un financement de la
Direction générale des Relations scientifiques, culturelles et
techniques du ministère des Affaires étrangères français
octroyé par M. Guillemin.
[33]Guy
Poitevin et Héma Rairkar (1994).
[34]L'un
avait pour thème la littérature orale (
loksâhitya) à Nanded au début de 1995 et un second
portait sur la figure de Sita à Poona en décembre 1995.
[35]Voir
M. Kondvilker (1985), Poitevin (1987), D. Pawar (1990), S. Kamble et B. Kamble
(1991).
[37]Ce
n'est pas la même caste que les
dhobi de l'Inde du nord. Les
parit notamment, bien qu'ils occupent une place très basse dans
la hiérarchie des castes, ne sont pas considérés comme
intouchables.
[38]Il
importe de souligner ici la difficulté pour des gens actifs dans le
domaine social de quitter leur travail pendant six jours pour un séminaire.
[39]C'est
le cas notamment de Philip Padachira et de Sandeep Pendse, si l'on en croit
leurs propres témoignages dans les évaluations qu'ils ont envoyées
à Guy Poitevin après le séminaire.
[40]Formule
récurrente de la littérature orale marathi, notamment dans les
ovï (en marathi
sâtâ samudrâpalikade
).